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La santé publique et l’environnement face à une forte pression

Brussels Airport, en tant qu’aéroport national, est une importante source d’activités économiques et d’emplois dans notre pays.

En même temps, l’emplacement de l’aéroport dans une région urbaine densément peuplée, le nombre élevé de vols et de vols de nuits, ainsi que la croissance continue de l’aéroport sont de moins en moins conciliables avec la qualité de vie des riverains et avec le besoin d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2050.

Le bruit des survols, des opérations de l’aéroport au sol et de l’énorme quantité de trafic routier conduit à de graves problèmes de santé. Tant chez ceux qui vivent et travaillent tout près de l’aéroport que chez les enfants dans les crèches et les écoles et ceux qui vivent et travaillent sous des trajectoires de vol très fréquentées. Ces personnes souffrent d’insomnie, de stress et de dépression et il y a surtout une augmentation du nombre de patients souffrant d’hypertension artérielle, de crises cardiaques et de thromboses cérébrales. La situation peut également mener à des déficiences cognitives. L’ Organisation Mondiale de la Santé (OMS) confirme que ces effets se manifestent

graduellement et s’aggravent à mesure que le niveau sonore et la fréquence d’exposition augmente.1

De plus, les émissions nocives, comme les particules ultrafines, conduisent également à des problèmes de santé. Sur la base d'une campagne de mesure et d’une modélisation de la qualité de l’air la Vlaamse Milieumaatschappij (Société flamande de l’environnement) a montré que les opérations de l’aéroport ont augmenté les concentrations en particules ultrafines (notamment les particules avec un diamètre de 10 à 20 nanomètres) jusqu’à une distance de 7 km de l’aéroport. La Vlaamse Milieumaatschappij a par ailleurs constaté que ces concentrations sont plus importantes à proximité de l’aéroport et sous le vent, et qu’elles augmentent avec le nombre de mouvements de vol. L’exposition aux particules ultrafines amplifie le risque de maladies cardiovasculaires et pulmonaires et peut avoir un impact négatif sur la croissance des fœtus.

La combustion du kérosène entraîne l’émission d’oxydes d’azote et par conséquent des précipitations d’azote. C’est l’un des facteurs qui contribuent au dépassement de la valeur limite de dépôt de l’azote à différents endroits (avec un dépassement maximal de près de 15 kg N/ha/an) dans la zone “Valleigebied tussen Melsbroek, Kampenhout, Kortenberg en Veltem”, zone protégée par la directive habitats. À proximité, d’autres zones protégées par la directive habitats2 sont également affectées par les précipitations d’azote élevées. Ces dépassements menacent la conservation durable des types d’habitat fragiles et doivent dès lors être réduits d’urgence.

L’émission de gaz à effet de serre par le secteur aérien a augmenté de manière systématique au cours des dernières décennies. En outre, pendant des années le secteur aérien a réussi à échapper à la législation et aux objectifs contraignants concernant la réduction de l’émission de gaz à effet de serre. C’est ce qui fait du secteur aérien l'une des causes du changement climatique qui se développent le plus rapidement et qui, de surcroît, anéantit les efforts d’autres secteurs pour réduire l’émission de gaz à effet de serre3. C’est pourquoi le secteur aérien a la grande responsabilité de prendre des mesures d’urgence, tant au niveau mondial qu’au niveau des aéroports et des compagnies aériennes, afin de réduire considérablement et durablement l’émission de gaz à effet de serre.

C’est le moment d’agir : quatre grandes mesures socialement équitables et économiquement justifiées

L’exploitation de Brussels Airport exerce une pression injustifiable sur la santé publique et l’environnement. Le temps presse pour passer à l’action. C’est pourquoi nous avons besoin de mesures qui limitent tant le nombre total annuel de mouvements de vol que la fréquence de survol des riverains d’une part. D’autre part nous devons miser sur des

 

Ces mesures peuvent être introduites à court terme sous forme de conditions particulières dans le cadre du permis d’environnement. Étant donné que le délai du permis actuel de l’aéroport expirera le 8 juillet 2024, une révision de ces conditions est opportune et faisable d’ici mi-2024. Vu les grandes problématiques environnementales (nuisance sonore, pollution de l’air et CO2) liées à l’aéroport et les exigences de plus en plus strictes à ce propos, il serait irresponsable de délivrer un permis d’environnement à durée indéterminée. En effet, les cadres politiques au niveau de la nuisance sonore, de la qualité de l’air et des émissions de CO2 ne feront que devenir plus stricts à l’avenir. Ces cadres politiques plus stricts devront être traduits en un nouveau permis d’environnement. C’est pourquoi maintenant les autorités peuvent délivrer un permis d’une durée maximale de dix ans, avec un scénario ambitieux et bien défini pour la réduction de l’impact environnemental. En 2034 les nouveaux objectifs politiques et les nouvelles perspectives pourront être traduits en un nouveau permis d’environnement.

Revendication 1 : Suppression progressive des vols de nuit

En 2019 il y avait 27.500 vols de nuit entre 23h et 7h4. Ces vols de nuit entraînent des risques importants pour la santé des riverains5. C’est pourquoi il est essentiel que les versions actuelle (2018) et future des directives de l’Organisation Mondiale de la Santé relatives au bruit aérien soient respectées. Cela ne se fera que par le biais d’une suppression progressive des vols de nuit, avec comme objectif final une suppression totale des vols de nuit d’ici 2024. Par la nuit nous entendons la période entre 23h et 7h, vu que la plupart des gens, et surtout les enfants, ne se lèvent qu’à partir de 7h6. Cette mesure apporterait un énorme bénéfice pour la santé puisqu’aujourd’hui les vols de nuit augmentent le risque de maladies cardiovasculaires (angine de poitrine, crise cardiaque, thrombose cérébrale) d’au moins 25 % chez 215.000 riverains7.

Revendication 2 : Plafonnement absolu du nombre de mouvements de vol

Plus il y a de mouvements de vol, plus grand est l’impact de l’aéroport sur la santé publique et l’environnement. Dans la période 2009 - 2018, le nombre moyen de mouvements de vol était de 230.000/an, avec un maximum de 239.000 en 2014.8En 2020 et 2021, le nombre de mouvements de vol était nettement inférieur à cause de la crise Covid (respectivement 95.000 et 119.000) et donc bien en-dessous de la moyenne de la dernière décennie. L’inclusion d’un plafonnement du nombre de mouvements de vol dans le nouveau permis d’environnement permettrait à l’aéroport de continuer à se  développer d’une manière durable sans dépasser les limites de ce que les riverains et l’environnement peuvent supporter.

D’une part, un plafonnement à 220.000 mouvements de vol par an à partir de 2024 ainsi qu’un plafonnement à 74 mouvements par heure pour les périodes de pointe permettrait à l’aéroport de se remettre de la crise Covid et de continuer à se développer de manière durable. D’autre part, ce plafonnement permettrait - en combinaison avec d’autres mesures - de respecter la capacité de charge des riverains et de l’environnement. La suppression progressive des vols de nuit, entre autres, (voir première revendication) et le remplacement des vols court-courriers par des trains internationaux nous permettraient de réaliser ce plafonnement sans toucher à l’accessibilité de Bruxelles et de notre pays. Parallèlement, l’aéroport peut développer un modèle de revenus durable en ne misant plus uniquement sur la croissance du nombre de passagers et des volumes de fret et en créant plutôt une plus grande valeur ajoutée par mouvement de vol à travers la différenciation des produits et un accent sur les marchés de niche, les spécialisations et les partenariats. L’augmentation de la plus-value substantielle par vol assurera la rentabilité économique de l’aéroport et créera davantage d’emplois véritables et qualitatifs, en dépit de la limitation du nombre total de vols.

Revendication 3 : Une zone de basses émissions en l’air

Ce qui est possible au sol dans les grandes villes comme Anvers, Bruxelles et Gand, devrait l’être aussi en l’air : une zone de basses émissions pour tous les avions qui décollent et atterrissent, tant au niveau du bruit qu’au niveau de l’émission de CO2, de particules fines et d’oxydes d’azote.

Le dernier durcissement des quotas de bruit (ou QC) pour les avions faisant escale à l’aéroport de Zaventem date de 2010. Ces quotas sont désormais fortement dépassés. Les grands aéroports des pays voisins ont adopté des critères bien plus stricts. L’aéroport de Zaventem doit se mettre en conformité en adoptant ces quotas de bruit minimaux : à partir de 2024 seuls les avions avec un quota count inférieur ou égal à 4 pourront arriver et partir. Pendant les week-ends ce sera un quota count maximal de 3.

Parallèlement, et en conformité avec nos engagements climatiques européens, les autorités doivent élaborer un calendrier dégressif des émissions carbone qui stipule quels avions peuvent décoller et atterrir à Zaventem jusqu’à quelle date. Ce durcissement échelonné des émissions carbone autorisées peut être réalisé en misant sur une interdiction immédiate des types d’avion particulièrement polluants et bruyants, un passage accéléré à des avions plus modernes et l’adoption de nouveaux carburants et technologies.

Revendication 4 : Des normes en matière de bruit et de fréquence de survol pour l’aviation en Flandre qui limitent les nuisances sonores au sol et qui assurent une limitation objective et équilibrée des nuisances pour tous les riverains

Outre les trois premières revendications, qui visent à réduire les émissions sonores à la source et qui doivent être reprises dans le nouveau permis d’environnement flamand de l’aéroport, il est également du devoir des autorités flamandes de reprendre des normes en matière de bruit et de fréquence de survol9 dans le permis.

Ces normes doivent être basées sur les valeurs indicatives de l’Organisation Mondiale de la Santé10. Ces normes doivent également déterminer le niveau de bruit maximal et la fréquence de survol maximale, tels qu'ils sont perçus au sol (immission). Ainsi le nombre de survols et la nuisance correspondante peuvent être limités de façon objective et équilibrée pour tous les riverains (en conformité avec la constitution) et la fréquence excessive de survols peut être réduite.

Afin de rendre ces normes exécutoires, les niveaux de bruit mesurés au sol par le réseau de surveillance et les fréquences de survol mesurées par le réseau de surveillance et/ou calculées par le modèle informatique doivent obtenir11 un statut légal (juridiquement exécutoire) et les dépassements doivent effectivement être sanctionnés. Puisque le réseau de surveillance actuel ne couvre pas l’entièreté du territoire, les autorités devront étendre fortement le réseau de points de mesure (à des distances de 2km, 4km, 8km, 12km, 16km, … du centre géographique A0 de l’aéroport). De plus, des mesures ad hoc avec un sonomètre à la demande de la commune et/ou des riverains doivent être autorisées pour une période représentative.

 

  1. Le chapitre 2 (paragraphe 5.1) du rapport ENVISA du 16/2/2022 propose une description exhaustive et étayée de l’énorme impact du trafic aérien sur la santé des riverains
  2. “Valleien van de Winge en de Motte met valleihellingen” en “Demervallei”.
  3. Cet article fournit les informations et chiffres essentiels4 La période entre 23h et 7h est la période standard utilisée pour décrire la nuit dans la directive UE 2002/49/EG relative à l’évaluation et à la gestion du bruit dans l’environnement.
  4. La période entre 23h et 7h est la période standard utilisée pour décrire la nuit dans la directive UE 2002/49/EG relative à l’évaluation et à la gestion du bruit dans l’environnement.
  5. Selon l’Organisation Mondiale de la Santé il s’agit entre autres de troubles du sommeil, d’hypertension, de maladies cardiovasculaires et de crises cardiaques. 6 La période entre 23h et 7h est la période standard utilisée pour décrire la nuit dans la directive UE 2002/49/EG relative à l’évaluation et à la gestion du bruit dans l’environnement.
  6. La période entre 23h et 7h est la période standard utilisée pour décrire la nuit dans la directive UE 2002/49/EG relative à l’évaluation et à la gestion du bruit dans l’environnement. 

  7. Il s’agit des habitants du contour Lnight 45 dBA.
  8. Voir https://issuu.com/brusselsairport/docs/brutrends_2018/2?ff
  9. Tous les survols qui produisent du bruit au sol (immission).
  10. Les valeurs indicatives les plus récentes de 2018 (notamment Lden 45dB et Lnight 40dB) ainsi que d’éventuels durcissements à l’avenir.
  11. Comme les sonomètres sont limités dans leur capacité de déterminer la fréquence des survols à cause de la configuration des seuils, il est essentiel de combiner ces mesures avec des modèles informatiques qui ne sont pas limités par des seuils.